L'Orient Le Jour, 11'10'2001
related project: Dialogue des cultures dans un jardin de sourds
 


«L’Oreille émettrice» : plastiquement impressionnant. 

Les balances de «25 jours d’un journal francophone» sont aussi un terrain de jeu pour les enfants.

Des curieux faisant l’expérience du «Dialogue de sourds».
(Photos Mahmoud Tawil)

Jusqu’au 30 octobre, les jardins de la Mission culturelle française, rue de Damas, sont ouverts au public, invité à venir y découvrir neuf installations visuelles et sonores créées par des étudiants de l’atelier de recherche de l’Alba. Intitulé Jardin acoustique, cet espace éphémère interactif est un des volets du projet «Dialogue des cultures dans un jardin», cosigné Alba/Mission culturelle française et qui s’inscrit dans le cadre des manifestations pour le IXe sommet de la francophonie.
Pourquoi Jardin acoustique ? «Parce que le jardin est un espace clos où différentes singularités peuvent cohabiter» et parce que «le phénomène acoustique de la langue parlée est la condition préalable à tout dialogue», expliquent les enseignants de l’atelier de recherche de l’Alba, Pierre Hage Boutros, Rana Haddad et Grégory Buchakjian, qui ont encadré les étudiants créateurs.
La plupart des œuvres sont installées en extérieur. La première, La porte de Wassim Maouad, accueille même les visiteurs à partir du… trottoir, puisqu’elle consiste en une sorte de bande dessinée, en noir et blanc, collée sur le portail coulissant de la Mission, côté rue.
Quelques mètres plus loin, sur la pelouse de l’ambassade de France, un grand cube orange qui enserre une trompe en aluminium. Et qui ressemble, d’après les remarques glanées, à un œil, une machine à laver ou un haut-parleur… Il s’agit de L’Oreille émettrice de Walid Tawil, Henri Frangieh et Maroun Rached. Sauf que cette oreille est muette comme une carpe. Elle ne produit pas le moindre petit son, mais hurle par son silence. Un conseil : contourner la boîte et poser l’oreille contre la petite ouverture.
Les bugs (de Walid Tawil, Henri Frangieh et Maroun Rached) sont de sympathiques petites bêtes noires spongieuses accrochées horizontalement sur une surface verticale. Et qui grésillent en chœur. En réseau. Il suffit de tendre l’oreille.
Dialogue de sourds (de Roula Akiki, Tania Ghosn et Dana Halwani) : une série de boîtiers avec fils électriques, boutons et mini-micros apparents. On presse sur un bouton, on parle… et on entend sa propre voix.
Les Postes à Galène (de Négib Matar et Roben Hajj Assaf) sont les ancêtres de la radio. Et ça marche !
25 jours d’un journal francophone (de Chirine Sayegh et Nadim Jamous) est «un laboratoire d’analyse de la presse francophone au Liban». Statistiques des ventes du quotidien L’Orient-Le Jour. Des sacs remplis de sable, alignés contre un mur. Et en face, des balances – qui font surtout le bonheur des enfants –, une pour chaque jour de la semaine. Un «spectacle» esthétiquement fort.
«La bande continue à se dérouler en silence» (de Danièle Salmé et Georges Maria), ce sont 7 056 bulles par m2 roulées et piquées sur la pelouse et qui forment un drôle de chemin. C’est aussi une vidéo, qu’on suit à travers plusieurs écrans et qui propose différents usages de ces rouleaux.
Il y a aussi Applaudissez de Deborah Pharès, une chambre toute tapissée de photographies de mains, et Tout est devant vos yeux (de Sandra Tabet et Marie-Noëlle Haddad), une installation… invisible. À chercher.
Reste à souligner qu’à moins de discuter avec les auteurs de l’exposition, il est impossible de saisir toute la symbolique et toute la philosophie des différents objets présentés. N’empêche qu’on peut tirer les conclusions que l’on veut ou que l’on sent. Et que la visite est en soi un moment agréable. Un parcours original et curieux, à la fois ludique et intéressant.

Natacha Sikias.